De la première à la seconde cybernétique : les apports sur les modèles de communication

C'est en s'appuyant en partie sur ce modèle que la première cybernétique a pu émerger, c'est-à-dire l'étude des systèmes complexes. 

Il convient alors d'introduire un personnage important des conférences Macy, il s'agit de Norbert Wiener dont l'expertise introduit la notion d'un concept essentiel, celui de feed-back, également nommé rétroaction. Pour illustrer cette notion on prend souvent la métaphore d'un thermostat dans un système de chauffage, système dit « complexe ». De manière schématique, le thermostat a pour rôle de permettre à l'utilisateur de passer une commande pour une certaine température, le thermostat fait ainsi le comparatif de la température qu'il détecte et de celle attendue. Si la température détectée dépasse celle attendue, il va ordonner à la chaudière de s'arrêter, il va d'une certaine façon l'inhiber. Tandis que si la température détectée est inférieure à celle attendue, il va donner l'information à la chaudière de s'enclencher. Le thermostat a ainsi pour rôle dans le système d'adapter une réponse à partir d'une information. 

Prenons maintenant quelques secondes pour transposer cela à la communication humaine. Dans un échange entre deux personnes, lorsque le locuteur s'adresse à son interlocuteur, il peut observer sa réaction et ajuster son discours à propos. Par exemple, si l'interlocuteur regarde ailleurs, le locuteur peut faire l'hypothèse de ne pas être entendu. Autre exemple, si l'interlocuteur fronce les sourcils, le locuteur peut estimer que son propos génère une réaction. Ces deux exemples relèvent d'un mécanisme de rétroaction. De manière générale, la rétroaction ou feed-back est spontanée et est quasiment instantanée. Il est le fruit d'un apprentissage très précoce; cela a pu être mise en avant dans l'étude des troubles du spectre autistique où l'on observe que cette rétroaction est difficile à appréhender pour les personnes composant avec ce trouble. 

Feed-back

Plus tard, Norbert Wiener, ira plus loin encore en parlant cette fois-ci de la notion de double feed-back ou double rétroaction, à savoir l'effet de la rétroaction sur le système. Illustrons ça brièvement par une application à la communication pour rester dans notre propos. Lorsqu'un locuteur pose une question à un interlocuteur, trois cas de figure sont possibles :

• L'interlocuteur répond de manière attendue à la question ; alors le locuteur comprend que sa question a été comprise par son interlocuteur.
• L'interlocuteur répond de manière inattendue à la question ; alors le locuteur peut faire l'hypothèse que sa question n'a pas été comprise par son interlocuteur et va pouvoir réajuster sa question.
• L'interlocuteur ne répond pas à la question ; alors le locuteur peut faire l'hypothèse de ne pas avoir été entendu ou bien que son interlocuteur ne souhaite pas maintenir l'échange avec lui. 

De manière très schématique, la notion de double feed-back expliquerait en partie la structure de nos échanges conversationnels. En partie seulement puisque si nous reprenons le schéma de Shannon et Weawer (1948), il apparaît que d'autres facteurs interviennent dans nos échanges conversationnels  dont le code (c'est-à-dire une langue commune avec sa grammaire, sa syntaxe, sa conjugaison), la source (les cordes vocales), le récepteur (le conduit auditif), le transcripteur (le circuit neuronal) mais aussi l'incrémentation (les connaissances acquises sur mon interlocuteur, âge, souvenirs, …) et des éléments contextuels comme le bruit (il est plus exigeant de maintenir une conversation dans un bar animé par exemple), la fonction des inter-actants ( une patronne, un collègue, un proche, une inconnue, …).

On comprend ainsi qu'une communication au sens d'un échange conversationnel est un processus qui met en mouvement un ensemble de facteurs qui vont venir structurer l'échange. Un élément important qui viendra complexifier davantage ce système complexe est la notion de pragmatisme que l'on retrouve en linguistique. Le prochain article visera à définir cette notion, et les apports quelle a dans la communication.